La Cour constitutionnelle allemande doit rendre mardi une décision cruciale sur la responsabilité du gouvernement allemand dans les missions de drones armés américains menées au Yémen. Ces attaques utilisent la base américaine de Ramstein, située dans l'ouest de l'Allemagne, comme relais de transmission.
La plus haute juridiction du pays annoncera sa décision à 10h00 (08h00 GMT) concernant la plainte de deux Yéménites de la région d'Hadramout. Ahmed et Khalid bin Ali Jaber ont perdu des proches lors d'une attaque de drones à l'été 2012.
Tragédie familiale au Yémen
« Il a fallu des heures » pour pouvoir identifier « des morceaux de corps carbonisés » comme étant ceux de deux membres de cette famille qui s'apprętait à célébrer un mariage, rappelle l'organisation de défense des droits humains ECCHR qui soutient les plaignants. Les deux Yéménites veulent obtenir du gouvernement allemand qu'il intervienne auprès des États-Unis afin qu'ils respectent le droit international.
Les drones ne décollent certes pas de Ramstein et ne sont pas non plus pilotés depuis ce lieu. Mais les signaux sont transmis par câble depuis les États-Unis jusqu'à Ramstein, d'où ils sont retransmis via une station relais satellite.
Question de droits fondamentaux
Les plaignants ont notamment invoqué « une violation de leur droit à la vie et à l'intégrité physique », avait résumé la plus haute juridiction du pays lors de l'examen de la plainte en décembre 2024. Il s'agit de savoir si ce droit fondamental impose à Berlin « des obligations de protection extraterritoriales », y compris au Yémen, lorsque des drones armés y sont envoyés en utilisant le territoire allemand, avait alors exposé la vice-présidente du tribunal Doris König.
Le dossier a connu un long parcours judiciaire avant d'arriver entre les mains des juges supręmes. La plainte remonte à 2014 lorsqu'Angela Merkel était chancelière.
Longue saga judiciaire
Washington menait alors régulièrement des attaques de drones au Yémen, notamment pour combattre Al-Qaïda. Si le tribunal de Münster (ouest) n'avait alors pas donné raison aux plaignants, il avait toutefois enjoint Berlin à prendre des « mesures appropriées » pour s'assurer que les États-Unis respectaient le droit international en menant ces missions, qui doivent en particulier épargner les civils.
Les autorités allemandes avaient fait appel auprès du tribunal administratif fédéral de Leipzig (est) qui avait rejeté la demande des plaignants en 2020. Ce tribunal estimait les efforts diplomatiques de Berlin suffisants pour garantir que Washington respecte le droit international.
Arguments du gouvernement
Les plaignants, soutenus par les organisations de défense des droits humains ECCHR et Reprieve, se sont alors tournés vers la Cour constitutionnelle. Pour le gouvernement, la plainte des Yéménites va trop loin.
Si Berlin devait « intervenir auprès d'alliés en raison de leur comportement à l'étranger, cela pèserait durablement sur la capacité de l'Allemagne à nouer des alliances », avait argumenté à l'audience le secrétaire d'État parlementaire au ministère de la Défense. Malgré le fait que leurs attaques de drones « violent souvent le droit international », les États-Unis « reçoivent le soutien de plusieurs gouvernements européens », dont Berlin, qui appliquent « des doubles standards en matière de droits de l'homme », déplore l'ECCHR dans son dossier consacré à l'affaire.
Critique des doubles standards
Alors que les pays développés « condamneront et, dans certains cas, poursuivront les crimes » commis par des États moins proches, ils montrent « peu d'enthousiasme » quand ces crimes sont commis par « des responsables politiques, militaires ou entreprises occidentales », ajoute l'organisation.
(AFP/Paris) Note : Cet article a été édité avec l'aide de l'Intelligence Artificielle.